Égypte : premières impressions

 

La première image que l’on a d’un pays est souvent celle que l’on retient.
En posant les pieds sur le sol égyptien, la première chose que j’ai ressentie est une certaine impassibilité, de l'apathie, ou de la nonchalance je ne sais pas, quelque chose qui y ressemble, tout cela parsemé de sourires, d'hospitalité et d'un brin de folie.  
Lorsque Voyageurs du Monde m'a contacté pour faire ce voyage, j'ai été quelque peu confuse. Honorée d'abord, j'ai très vite commencer à me poser des questions. Qui ne s'en serait pas posé ? 
L'Égypte est un pays merveilleux, que j'ai toujours rêvé de visiter, mais j'avoue avoir mis la destination de côté, m'intéressant depuis pas mal d'années à d'autres lieux, au détriment des pays musulmans en général. 
Bien souvent à cause des médias, et de tout le raffut que l'on en fait. On fait facilement l'amalgame entre les différents conflits, on met tous les pays du monde arabe dans le même sac, et on ne s'en préoccupe plus, on va ailleurs. C'est ce que tout le monde fait. Et je l'ai fait. Et aujourd'hui avec le recul je n'en suis pas fière. Je me dit que si tout le monde agit ainsi, beaucoup de pays en pâtiront, et le monde ne s'en portera pas mieux...
Puis il y a l'entourage, deuxième motif de dissuasion sur cette planète. Je vous mets au défi d'annoncer à votre famille ou vos amis que vous partez en Égypte et de voir leurs réactions. En général vous aurez droit à des "Mais ce n'est pas trop dangereux ?" "L'Égypte en ce moment, ça craint." Voilà ce à quoi vous ne pouvez échapper. Et puis il y a aussi la place de la femme dans ce monde très particulier.
C'est la première fois pour moi que je pars seule en voyage, alors autant vous dire que ça fait beaucoup de questionnements à l'annonce de ce projet. 

- Rappel des faits -
Le tourisme égyptien a traversé plusieurs périodes d'hostilités, notamment à la fin des années 90 et au début des années 2000 où des attentats visaient des touristes. Pourtant à cette époque et des années durant, le tourisme est en recrudescence, et cela n'empêche pas les occidentaux de visiter les lieux mythiques de l'Égypte Antique.
Mais le pays, toujours en proie à de nombreux conflits politiques sous le pouvoir de Moubarak, a vu sa situation dégénérer avec la Révolution de 2011. C'est à ce moment-là que le pays a sombré, économiquement parlant, n'arrivant plus à se relever. Pourtant, depuis le Coup d'État de 2013, la révolte du peuple s'est de nouveau apaisée, mais le tourisme tarde toujours à reprendre. 

Pour ma part, quand je me suis vue proposée une croisière sur le Nil à bord du Steam Ship Sudan, j'y ai réfléchi à deux fois. Le bateau a l'air idyllique, la réputation de Voyageurs du monde n'est plus à faire, et il se trouve que je ne connais l'Égypte qu'au travers les photos et récits de mes beaux-parents, ainsi que les faits historiques appris il y a fort longtemps qu'il me reste de mes souvenirs d'enfance.
Mais de l'autre côté, il y a les angoisses de la famille, la peur de partir seule dans un pays a l'allure pas très stable, et toujours le souvenir de certaines informations que les médias se sont fait une joie de nous montrer du temps de la Révolution...
Peser le pour et le contre. Se renseigner sur la situation actuelle du pays, lire des avis de gens partis en 2014, discuter avec des personnes ayant vécu là-bas, connaître le point de vue du Ministère des Affaires Étrangères... et finir par se laisser convaincre.

Pourquoi ?
Parce que cela fait plus d'un an que le Coup d'État a eu lieu, qu'hormis quelques manifestations sporadiques le vendredi au Caire, le peuple n'est plus en pleine révolte. Et qu'à partir du moment où l'on sait plus ou moins quand et ont lieu ces manifestations qui pourraient éventuellement déborder, on ne va clairement pas prendre le risque de se balader ce jour-là au Caire ou plus précisément Place Tarhir.
Parce qu'à partir du moment où l'on est informé de la situation, on sait à quoi s'attendre, aussi, on sait qu'on ne se baladera pas seule au hasard des rues, d'autant plus en étant une femme, mais cela est valable aujourd'hui comme ça pouvait l'être il y a 15 ans. 
Parce qu'on sait qu'on n'ira pas dans des zones formellement déconseillées par le Quai d'Orsay, qui, de par leur proximité avec des pays en guerre, représentent une menace terroriste importante, cela vaut pour la région du Sinaï et tout le Sahara actuellement.
Parce que j'ai fini par comprendre, que ce n'est pas parce qu'un pays, un continent, comporte des zones à risque qu'il faut le bannir dans son intégralité. Et c'est le cas de l'Égypte, si plusieurs régions sont interdites au tourisme, celles qui intéressent la plupart des voyageurs ne sont pas touchées par ces interdictions. La Vallée du Nil, de Louxor à Abou Simbel, les grandes villes comme Alexandrie et Le Caire, peuvent faire l'objet d'un voyage, en prenant compte toutefois de ne pas sortir des sentiers battus. 
Parce qu'il est injuste de faire subir nos peurs à des populations qui n'ont rien demandé à tout ça et qui en sont pénalisés dans leur vie.

Si j'ai décidé de commencer le récit de mon voyage en Égypte par ces explications, c'est tout simplement parce que c'est quelque chose qui me touche profondément, j'ai eu beaucoup de retours, de questions sur les réseaux sociaux, sur la dangerosité du pays.
J'ai moi-même été confronté à des peurs, des angoisses infondées avant mon départ. C'est la raison pour laquelle j'ai souhaité m'exprimer à ce sujet. 
Non pas pour vous convaincre qu'il n'y a aucun risque à voyager en Égypte, ce serait faux de dire ça, mais pour faire comprendre au plus grand nombre que chacun est libre de ses voyages, et que parfois, au-delà de nos peurs, il suffit juste de se renseigner, d'être informé, parfois accompagné pour les plus angoissés. Mais qu'il ne faut pas juger un pays sur sa religion, qu'il serait réducteur de croire que tous les musulmans sont des fanatiques. Il faut s'intéresser au pays, à sa culture, essayer d'en comprendre sa situation politique pour comprendre ce qu'ils vivent, et ce par quoi ils sont passés. Et une fois que l'on a compris ça, on peut changer sa vision des choses.

Et s'ouvrir au monde.

Partir aujourd'hui en Égypte a été une chance pour moi, ce que j'y ai vu, senti, m'a fait prendre conscience de pas mal de choses.
On se fait souvent une idée d'un pays, d'une population. Mais on ne peut la juger qu'à travers son histoire, son vécu. Ces gens-là sont enjoués, drôles, plein de ressources. Ils essaient de vendre ce pour quoi ils vivent, mais même s'ils n'y arrivent pas, auront toujours une petite blague à vous soumettre, ou un mot gentil, parfois triste... "Dîtes aux touristes qu'on a besoin d'eux et qu'on ne leur veut aucun mal... dîtes leur de revenir..." 
Après une semaine passée entre Louxor, Assouan & Le Caire, je n'ai, à aucun moment, senti la moindre insécurité. Pas même lors de promenades nocturnes, entre blogueurs* à travers des souks, lorsque nous étions les seuls occidentaux à ratisser les lieux.
De plus, voyager à cette période représente un sacré avantage, avant le retour du tourisme (si retour il y a), car cela m'a valu des photos des Pyramides et d'autres temples incommensurables, sans trop de touristes dessus. Et puis, il y a aussi le climat, décembre est un mois particulièrement agréable, il y fait 32°c la journée, et les soirées sont plus fraîches, je suis d'ailleurs revenue complètement jet-laguée, le dépaysement y a été total, si bien que j'ai eu l'impression de partir à l'autre bout de la planète...
Et puis, la rencontre avec ce Nil, majestueux, qui nous appartenait presque...
Perdre la notion du temps, de la vie... oublier que nous sommes à quelques jours des fêtes de fin d'années... cette sensation bizarre d'être ailleurs, loin de tout, dans cette immensité... J'ai aussi pris conscience du fait qu'il y avait à l'époque près de 350 bateaux naviguant sur le Nil, aujourd'hui il n'en reste que 18. Je trouve cela complètement fou... Vous imaginez le drame pour les populations ?
Et pourtant, quelle différence y a t-il entre le pays d'aujourd'hui et celui d'il y a 15 ans ? Aucune, je pense. Car si la destination ne connaît pas la stabilité de pays occidentaux, il en a toujours été ainsi, la différence se situant entre le changement de gouvernement, ce qui au final, ne touche pas tant le petit monde du voyageur
Alors, avant de nous enfermer dans des préjugés, prenons le temps de la réflexion, de jauger un pays, de se le faire raconter, de le comprendre, et c'est ainsi que nous ferons alors le plus merveilleux des voyages.

Je vous invite à lire cet éditorial fort de sens, qui m'a aidé a prendre ma décision, publié par JF Rial, Pdg de Voyageurs du Monde.

*Les blogs Wild Birds Collective & Miles and Love m'accompagnaient sur ce voyage.

 
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